3 films de genre de l’année 1932

En 1932, Freaks de Tod Browning nous transporte dans un cirque aux membres difformes et Scarface (Howard Hawks et Richard Rosson) révolutionne le film de gangster tandis qu’au Japon, Yasujirō Ozu sort les Gosses de Tokyo, une comédie dramatique muette et rebelle. Mais des films d’horreur marqueront également les esprits…


Vampyr (Carl Theodor Dreyer)

Réalisé en 1932 par Carl Theodor Dreyer, Vampyr raconte l’histoire de Allan Gray, jeune homme solitaire et féru d’occultisme se rendant dans le village de Courtempierre. Un soir, dans sa chambre d’hôtel, un mystérieux personnage lui remet un livre traitant des vampires et de la façon de les détruire. Un jour, se promenant aux abords d’un château, il apprendra que la fille du châtelain est atteinte d’un mal étrange, apparemment provoqué par une vieille femme.

Vampyr a la particularité de se positionner entre deux époques, à savoir celle du muet et du parlant, créant ainsi une dichotomie renforçant l’étrangeté du métrage.

Baignant tout du long dans une inquiétante étrangeté, le récit de Dreyer nous plonge dans un cauchemar éveillé basé sur le mythe du vampire. Dans un mélange de contrastes, les ombres se font ténèbres, angoissantes et terrifiantes.

Porté·e·s par des airs mélodiques mélangeant douceur et macabre, nous sommes invité·e·s à un voyage invoquant l’onirique et le surnaturel. De voyage, il en est par exemple question avec cette scène angoissante où un homme, portant une faux et se tenant sur un ponton au bord d’une rivière, fait sonner une cloche, tel Charon sur le Styx.

Vampyr est l’adaptation de deux livres de Sheridan Le Fanu, Carmilla et La Chambre de l’auberge du Dragon volant, tous deux parus en 1872. Classique d’entre les classiques, Dreyer mixe les deux œuvres pour extraire le meilleur de l’essence de l’auteur originel.

Il est à noter, pour l’anecdote, qu’un défaut sur la pellicule concernant la lumière s’était immiscé pendant le tournage mais Dreyer a jugé préférable de le garder, renforçant encore plus l’ambiance mortifère du film. Mortifère est assurément le terme convenant le plus à l’ensemble car au-delà des adjectifs cités plus haut, c’est ce dernier qui prédomine. À aucun moment, une note de légèreté ne se fait sentir et nous sommes entouré·e·s, tout comme le héros, d’un univers morbide et sans joie. Œuvre phare et indispensable pour tout·e cinéphile aimant l’épouvante, ce film est définitivement à conseiller.


White Zombie (Victor Halperin)

Réalisé en 1932 par Victor Halperin, White Zombie est le premier film traitant du thème du zombie, celui utilisant le folklore et les superstitions d’Haïti. Il faudra attendre 1968 et George Romero pour connaître le renouveau du mort-vivant qui s’éloignera des origines pour créer sa propre mythologie telle que nous la connaissons encore aujourd’hui. Entre-temps, Wes Craven reviendra aux origines vaudous avec L’Emprise des ténèbres (1988).

Madeleine, en voyage vers les Antilles pour rejoindre son compagnon Neil en vue de se marier, fait la connaissance pendant le trajet de Mr Beaumont. Celui-ci tombe secrètement amoureux d’elle et invite le futur couple dans sa demeure pour célébrer la cérémonie. Dans une plantation de cannes à sucre proche de là, Mr Legendre utilise de la main-d’œuvre servile en transformant les gens en zombies.

Beaumont demandera à Legendre de l’aider à conquérir le cœur de Madeleine, étant prêt à recourir aux envoûtements de ce dernier. Dans une ambiance étouffante et moite plongée dans l’obscurité, au son de tams-tams lointains annonçant des rites ancestraux, Halperin nous livre un film certes imparfait (on pensera à l’interprétation bancale ou fade de certains acteurs, sauf Bela Lugosi en sorcier fourbe et machiavélique à souhait et à Madge Bellamy, femme au visage blafard dans son état de non-vivante) mais ayant le grand mérite de proposer et d’être le précurseur d’un sous-genre qui engendrera de nombreux rejetons au cours des décennies suivantes, pour le meilleur comme pour le pire.

Au-delà de l’épouvante, ce film inclut aussi un drame impliquant un triangle amoureux (Madeleine/Neil/Beaumont) avec un zeste d’aventure (Neil allant jusqu’au château de Legendre pour sauver sa dulcinée et combattant les serviteurs à la solde de celui-ci).

White Zombie pose les bases et les fondations d’un genre qui saura traverser le temps. Abstraction faite des menus défauts (inhérents à l’âge du film même si cela reste subjectif), il reste néanmoins un classique du genre qui mérite d’être (re)découvert.


Island of Lost Souls (Erle C. Kenton)

Erle C. Kenton réalise en 1932 la troisième adaptation filmique de L’Île du docteur Moreau, roman de H. G. Wells.

Edward Parker, victime d’un naufrage, est recueilli par un navire marchand, Le Covena. Le capitaine, une brute alcoolique, doit livrer des animaux sur une île où habite un scientifique faisant des expériences obscures, le Docteur Moreau. Edward, ne s’entendant pas avec le capitaine, n’aura d’autre choix que de débarquer sur l’île en compagnie du médecin Montgomery, pour attendre le prochain bateau pour Apia, où l’attend sa fiancée. Une fois sur place, il apprendra que Moreau pratique des expériences inavouables, créant des hybrides humain·e·s/animaux.

Malgré que le film accuse son âge et qu’un ventre mou s’installe en milieu de métrage, L’Île du docteur Moreau reste un classique indéniable des années 1930. Sans effet spécial et uniquement avec quelques maquillages (qui peuvent sembler désuets à notre époque), Erle Kenton crée un climat de tension quasi permanent.

Moreau, interprété par Charles Laughton (Les Révoltés du Bounty), est l’exemple parfait du savant fou, égocentrique et narcissique, ne vivant que pour et par ses expériences. Faisant fi des considérations et de l’éthique humaines, il se prend pour l’égal de Dieu. Qu’importe les situations, il restera d’un calme olympien, ne se souciant aucunement du sort ou des sentiments des autres. Sa folie est exacerbée car même s’il réussit ses expériences, ce n’est pas pour montrer les résultats au public car il a été banni des sphères scientifiques. Non, il le fait pour son propre compte et sa satisfaction personnelle.

Deux autres adaptations verront le jour : Celle de Don Taylor avec Burt Lancaster en  1977 et celle de John Frankenheimer avec Marlon Brando et Val Kilmer en 1996.


4 commentaires sur “3 films de genre de l’année 1932

Ajouter un commentaire

      1. Oui ! Il a un petit rôle dans le sens où on ne le vois pas beaucoup mais en même temps, ce dernier a énormément d’importance dans le récit 🙂

        Aimé par 2 personnes

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Créez un site ou un blog sur WordPress.com

Retour en haut ↑

%d blogueurs aiment cette page :