Je tiens à le dire tout de suite, je ne suis pas un énorme fan en général de ce sous-genre qu’est le found footage, simplement par pur affinité artistique mais aussi selon mes goûts. Loin de moi l’idée de faire mon fermé d’esprit bien entendu, j’ai tout de même regardé pas mal de films dans cette veine-là, que ce soit les [•REC], Blair Witch, VHS et autres joyeuseté du genre. Lorsque j’ai entendu parler de Night Shot (Hugo König, 2018), diffusé en exclusivité sur Shadowz, je me suis jeté dessus assez rapidement. Il faut dire que le postulat de base était alléchant : une production française indépendante menée par un réalisateur créatif nous proposant comme film un unique plan séquence. Si le film n’est pas exempt de défaut, force est de constater que le défi lancé par ce réalisateur fut à la hauteur du résultat : une ambiance oppressante au possible, une atmosphère glauque qui fonctionne tant le sanatorium fut utilisé dans toute sa complexité en termes de mise en scène. Il faut dire que mon excitation fut assez grande lorsque l’on m’a proposé de découvrir pour Three Mothers Films, le tout nouveau travail de Hugo König, intitulé Gliitch. On est ici encore face à une production quasiment indépendante, avec une approche cette fois-ci différente. Adieu l’unique plan séquence, le réalisateur revient cette fois-ci avec une nouvelle approche technique au travers d’une mise en scène plus « classique » : l’exploration du glitch, phénomène audiovisuel au travers duquel Hugo König va y insérer une dimension psychologique.

On remarque dès le début du long-métrage la présence de thématiques chères au réalisateur, à savoir l’urbex, qui consiste en l’exploration de lieux abandonnés (pour faire simple), pratique à la limite de la légalité mais qui se révèle intéressante par son approche nouvelle d’un lieu marginalisé. Cette fois-ci, finis les sanatorium crasseux et lugubres, le film se centre cette fois-ci sur une approche plus rurale de cette thématique, au travers d’une exploration qui se fait dans une forêt réputée comme étant hantée. On pourrait déjà reprocher à Gliitch une ressemblance trop prononcée avec Le Projet Blair Witch, mais ça serait mal connaître Hugo König qui va nous proposer un récit plus complexe en compagnie d’une caméra instable et malade. Centrant dans un premier temps son approche sur de la possession classique à l’égard d’une guide entrainant notre groupe de jeunes journalistes de l’extrême dans une forêt immense mais si étouffante, le cinéaste prend le temps de développer avec force ce qui faisait déjà la qualité de son premier long-métrage : un lieu où tous les dangers sont possibles, ce qu’il fait ressentir par l’appropriation de cet espace avec une caméra agitée afin de renforcer l’angoisse d’une forêt inconnue, dans laquelle tout peut arriver. Le mystère de ce endroit hanté est préservé judicieusement, et même si cette escapade forestière commence à devenir un tantinet long, le cinéaste arrive à opérer dans une troisième et dernière partie ce qui semble être la meilleure approche de son œuvre.
Décidant de centrer l’approche sur un seul de ses personnages, Gliitch va peu à peu transcender sa caméra et ses fonctions premières pour nous offrir une œuvre quasiment expérimentale dans ses 25 dernières minutes. Axant la narration désormais sur une seule de ses protagonistes, Hugo König développe au milieu de ces glitchs de caméra les thématiques du traumatisme familiale à travers la toxicité parentale et les conséquences psychologiques qui peuvent en découler. Ainsi, la caméra devient un objet introspectif qui permet de disséquer en profondeur nos protagonistes dans leurs abysses mentaux. Se faisant plus intime, cette troisième partie permet au moyen d’un montage brut et assez avant-gardiste dans son approche de basculer d’une horreur surnaturelle à une approche horrifique purement psychologique. La forêt hantée devenant ainsi un lieu où s’assemble souvenirs douloureux et introspection conférant à la mise en scène minimaliste proposée une richesse bienvenue !
Cette troisième partie vient apporter une satisfaction aux 30 premières minutes qui semblaient beaucoup trop classiques concernant le found footage, et qui vient rattraper une certaine inégalité dans la performance de l’acting. Toutefois, s’il ne propose pas une approche aussi technique visuellement parlant que dans Night Shot, Hugo König explore encore une fois de manière pertinente la polyvalence de sa caméra et propose un récit métaphorique dans lequel la mise en scène permet de sublimer l’approche progressivement psychologique de son long-métrage, offrant un espoir plus que confirmé dans le renouveau du found footage.
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