Horror in the High Desert (Dutch Marich, 2021) est un film américain de type faux documentaire qui oscille entre found footage et true crime. Le métrage est présenté comme une vidéo explicative de la mystérieuse disparition de Gary Hinge, un jeune homme dont les passions sont le survivalisme et l’exploration de territoires sauvages dans la région désertique du Nevada. Le récit débute par les interviews de la grande sœur et du colocataire du disparu, qui parlent tour à tour du jour présumé de sa disparition.

Entre photographies de mauvaise qualité de notre disparu au grand sourire, entretiens réalisés avec d’autres personnes impliquées dans les recherches (colocataire de Gary, détective privé, une journaliste à fond dans l’affaire) et vidéos plus persos de Gary, ce film dispose d’un montage un peu bidon, disons-le, qui va jouer énormément sur l’implication du public. Cet aspect « investigation du dimanche » à mi-chemin entre révélations chocs et les inquiétudes de l’entourage de Gary rend ce pseudo-documentaire authentique. On nous prévient rapidement : le corps de Gary n’a jamais été retrouvé malgré les recherches intensives de la police, la communauté et les intéressé·e·s. Entre les moments « émotion » de la sœur de Gary et les retours du détective privé, le public a le droit à des parties plutôt chill avec des vidéos de Gary en plein road trip au cœur du désert, sa passion pour les trains et ses découvertes étranges. Des vidéos issues de la vie cachée de notre homme qui tenait à l’abri des regards de ses proches un vlog survivaliste au nombre de follows assez impressionnant. C’est à ce moment-là que le film devient intéressant. On peut y voir une critique des réseaux sociaux, du survivalisme et pourquoi pas du colonialisme ? Des abonné.e.s vénères de Gary, qui vont le traiter de menteur et le pousser à retourner vers une étrange cabane découverte lors d’une de ces longues balades qui le terrifie pourtant plus que tout, à l’incompréhension sur l’identité de son tueur présumé (le corps de Gary n’étant jamais retrouvé), ce métrage joue sur son format « émission TV d’investigation » qui se conforme à mixer le sensationnel et l’émotionnel pour fidéliser un public friand d’histoires étranges et de true crime sordides. Jouant sur les disparations mystérieuses réelles d’américain·e·s dans des zones naturelles et parcs nationaux, Horror in the High Desert reprend ainsi à 100% le format TV Show à l’américaine afin de semer le doute.

La tension monte lentement mais sûrement jusqu’à ce que le réalisateur dévoile les extraits d’un found footage offrant la dernière apparition connue de Gary, balancés à l’écran après que le public ait petit à petit activé son empathie envers nos protagonistes. Les événements inexplicables et inquiétants entourant sa disparition titillent juste assez pour nous donner l’envie dévorante de connaître le fin mot de l’histoire. Et bien que Horror in the High Desert prend le temps de démarrer en douceur, avec des interviews réalistes au casting naturel, il conclut sa narration avec une bonne dose d’horreur surprenante et extrêmement dérangeante sublimée par des séquences en vision nocturne. Seul hic : faut aimer se plonger dans des affaires criminelles étranges de plus d’une heure. Si vous vous attendez à un film d’horreur standard, vous serez indéniablement déçu·e·s ! Horror in the High Desert est davantage une fausse émission TV à deux balles avec une pointe de terreur qu’une œuvre horrifique déboîtante, mais c’est justement ça qui est fun !

GROS SPOIL
Après les segments horrifiques où on découvre la traque filmée à la première personne entre Gary et cette personne énigmatique, habitant dans la bicoque insolite perdue au milieu de nulle part, la journaliste termine son discours en émettant l’hypothèse qu’il s’agit là d’une sorte de famille de dégénéré·e·es aux caractéristiques physiques particulières qui aurait été mise au banc de la société. Mais pourquoi ce style amérindien ? Entre le chant mystérieux entendu par Gary lorsqu’il approche de l’habitation rappelle le cri de guerre (ou de ralliement) caractéristique des autochtones d’Amérique du Nord, le style vestimentaire ainsi que l’espèce de machette, le film laisse sous-entendre qu’il s’agit là d’un individu d’origine amérindienne vivant hors de la société américaine depuis des générations, ce qui expliquerait ses difformités sûrement dues à une consanguinité répétée et une organisation sociale endogène. Mais d’autres possibilités s’ouvrent, surtout que cet agresseur semble savoir conduire (comme en témoignent les traces de pieds nus retrouvées par la police dans la voiture de Gary) : un fou marginal ? Un survivaliste fanatique ? Une sorcière chamane ?
Ce « monstre », cet « autre » représente au final le véritable survivaliste de l’histoire, vivant reclus depuis des années voire des générations, dans cette petite cabane de fortune. Il se retrouve stalké, filmé, et presque chassé pour le bonheur des followers de Gary. Tandis que le jeune homme est apeuré et décidé à le filmer uniquement pour ne pas perdre son audience, cette mystérieuse « créature » ne fait que se protéger. Une certain sentiment de malaise se distille alors, qui est vraiment l’attaquant ? Ce marginal déformé et pieds nus le laisse pourtant partir la première fois… Et ce n’est que lorsque Gary revient sur son territoire, le filme et lui tire dessus que celui-ci devient véritablement un danger. Il renverra d’ailleurs la main coupée de Gary cramponnée à sa caméra comme si cet objet était la réelle raison de ce conflit et de cette mort prématurée…
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