En 2021, Netflix diffusait l’une de ses séries les plus inoubliables : Midnight Mass (Mike Flanagan). Construite autour d’un propos dénonçant le fanatisme religieux, la série se distinguait notamment par ses longues plages de dialogues, toutes plus fascinantes et bourrées de sens les unes que les autres. Impossible de ne pas penser à ce chef-d’œuvre de la SVOD en découvrant The Righteous (2021), écrit, joué et réalisé par Mark O’Brien, qui débarque en exclusivité sur la plateforme Shadowz.
L’argument de départ du film (un couple fait face au décès accidentel de leur fille adoptive) laisse progressivement la place à une réflexion sur la foi, le péché, le bien, le mal, Dieu, le Diable, la rédemption, la pénitence… Un plateau thématique un peu trop pantagruélique pour le gourmand Mark O’Brien, qui, bien qu’il ne parvienne pas à mener à leurs termes tous ces sujets, réussit tout de même à faire émerger le propos principal du long-métrage : comment racheter nos péchés ?

Là où Midnight Mass, pour reprendre la comparaison, pointait du doigt les outrances de la religion, The Righteous choisit de prendre le contrepied total de ce propos dénonciateur en proposant au contraire une plongée très sérieuse et éminemment sincère dans les affres existentiels avec lesquels les croyant·e·s ont à cohabiter. Loin d’adopter une posture moqueuse et cynique, le film propose à l’inverse une approche empathique avec ses personnages (dont celui du protagoniste principal interprété par le parfait Henry Czerny). Ses doutes, la progressive révélation de son péché fondateur et ses efforts pour se racheter sont ainsi traités avec une sincérité dont l’absence totale de second degré n’a d’égale que la compassion que l’on éprouve à l’égard de ce prêtre défroqué.
Dans le rôle de l’étranger (Aaron), celui du ver qui viendra gangréner le foyer de l’intérieur, Mark O’Brien peine malheureusement à convaincre, son jeu étant beaucoup trop lisse pour inquiéter le public, et le rôle qu’il endosse beaucoup trop lourd pour ses épaules. À cet égard, l’erreur de casting est manifeste, entraînant par voie de conséquence un détachement quasi permanent par rapport à son personnage. La nature de ce dernier, que l’on ne dévoilera pas ici, aurait mérité une incarnation beaucoup plus nuancée et surtout moins fade. Ce qui a pour conséquence de décupler par effet de contraste la composition extrêmement riche de Henry Czerny.

Plastiquement, le metteur en scène opte pour un très beau noir et blanc, même si l’on devine à travers la mise en scène le budget limité du film. Ce parti pris esthétique traduit d’une part l’universalité et l’intemporalité du propos, mais plonge également l’histoire dans une austérité formelle assez fascinante, s’accordant à merveille avec les longs monologues qui parsèment le métrage, certains tombant malheureusement à plat (la fausse anecdote du personnage de Aaron), d’autres, au contraire, s’avérant d’une réelle richesse (le monologue du prêtre expliquant au personnage principal la notion de péché, notamment).
Enfin, la grande force du film réside également dans son jusqu’au-boutisme, en proposant in fine une manifestation concrète et visuelle de l’un des épisodes les plus apocalyptiques de la Bible, dans un dernier plan à la puissance d’évocation immédiate qui porte l’estocade finale au personnage principal , tout en imprimant à The Righteous une ultime dimension fantastique que l’on avait pas forcément vu venir.
De là à dire que l’apocalypse est liée à nos choix personnels, il n’y a qu’un pas que nous franchirons allègrement.
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