Dans le nord de l’Espagne, à quelques kilomètres de Burgos, se trouve le site archéologique d’Atapuerca. Découvert depuis plus d’un siècle suite à la construction d’une ligne ferroviaire, les fouilles ont réellement commencé dans les années 1960. Des squelettes humains trouvés dans les années 1970 et en 1994, dans une des quelques galeries que compte le site, on retrouve les restes d’une bonne dizaine de personnes, datant de 800 000 ans, à quelques vaches près. Détail curieux, ces ossements présentent des traces étranges : stries de boucherie, fractures anthropiques sur des os à moëlle, marques de décapitation… le tout réalisé par des outils en pierre et mélangé à des restes d’animaux. Les archéologues sont formel·le·s : nous sommes face aux toutes premières évidences d’un meurtre primitif, préhistorique. Mais il se murmure tout bas que cette scène plutôt effroyable serait aussi la preuve d’actes de cannibalisme, d’un lointain festin anthropophage sordide…

Plus près de nous dans le temps, au XIXe siècle, mais plus loin sur notre planète, le chef fidjien Udre Udre était convaincu qu’ingérer 1000 êtres humains allait lui assurer l’immortalité. Manque de pot pour lui (et pour ses victimes assurément), il mourut après avoir mangé 872 individus (certains chercheurs baissent ce chiffre à moins de 100 mais ne faisons pas la fine bouche). Plutôt écolo, Udre Udre mangeait tout de l’humain, quitte à cuire et recuire plusieurs fois les morceaux de viande, qu’il emportait ainsi partout sur lui dans une petite boîte, genre doggy bag.

L’anthropologie et l’ethnologie fourmillent d’histoires anthropophages comme celles-ci et si elles nous font à chaque fois frissonner, c’est que le cannibalisme est un acte hautement tabou dans notre société occidentale et contemporaine. Manger de l’humain pour se nourrir ? Ou par rituels et croyances ? Les différents paléoanthropologues en débattent encore et quand il y a des questions qui fâchent et qu’il s’agit de briser les tabous, le cinéma de genre n’est jamais bien loin…
Que l’humain soit éviscéré et mangé sauvagement comme dans Cannibal Holocaust (Ruggero Deodato, 1980) ou Green Inferno (Eli Roth, 2013), qu’il soit savamment cuisiné et dégusté comme dans la série Hannibal (2013) ou le tout récent Fresh (Mimi Cave, 2022) ou bien qu’il soit encore la victime de dégénérés bien souvent issus de l’Amérique profonde comme La Colline a des yeux (Aja, 2006) ou la saga des Détour Mortel, notre corps a été croqué à toutes les sauces par le cinéma de genre et le sujet est si touchy que ce n’est peut-être qu’un début.

Alors certes cela nous dégoûte, nous révulse. Mais réfléchissons bien, si cela devait s’avérer nécessaire, quelle serait la meilleure façon de nous cuisiner ? Quelles sont nos parties les plus tendres et celles à éviter ? Comment bien cuisiner l’humain ? Guillaume V. est chef cuisinier dans un restaurant, n’a pas d’humain à sa carte mais a bien voulu se prêter au jeu des questions/réponses.
Bonjour Guillaume et merci beaucoup de m’accorder cet entretien. Aujourd’hui, on va parler d’un plat que tu as, je l’espère, peu l’habitude de cuisiner : l’humain.
Alors déjà, on part plutôt sur de la viande rouge ? Donc quels sont les aspects nutritifs ?
Côté nutrition, la viande rouge regorge de fer, protéines, vitamines B12, de zinc et des acides aminés.
Selon ton expérience… Non pardon. À ton avis, quelle est la meilleure partie de l’humain à cuisiner ?
Selon moi la meilleure partie dépend de l’élevage… enfin, de la vie de l’humain en question. Une personne en bonne santé qui mange beaucoup de céréales fournirait un excellent foie gras je présume… Sinon un bon humain bien en chair serait riche en entrecôtes. Enfin, la cervelle doit être particulièrement délicieuse juste panée et frite (peu importe l’intelligence du sujet).
Et a contrario, la pire ?
La pire partie serait les testicules (caoutchouteux ?), les mollets et avant-bras qui sont beaucoup sollicités et donc un poil durs sous la dent…
Beaucoup de films montrent des cannibales mangeant de la chair crue. Alors un tartare, est-ce envisageable ?
Un tartare pourquoi pas, mais du dos ou du fessier, taillé au couteau bien évidemment.
Qu’en est-il des abats ? Ou de la cervelle ?
Hormis la cervelle évoquée plus haut, le foie juste saisi avec de l’échalote et déglacé au vinaigre de framboise…
Et on boit quoi avec ? Un verre de chianti, comme notre ami Hannibal ?
Pour la boisson, tout dépend du morceau et de la cuisine. Sur du cru un Vacqueyras rouge, du juste cuit un Sancerre rouge et du confit je tenterais bien un Saumur Champigny.
Et alors ? Pourquoi avec tous ces bons conseils, ne pas en mettre à ta carte ?
On va y réfléchir pour mettre à la carte…
Merci Guillaume pour ces bons tuyaux !
Toutes aussi véridiques et appétissantes que sont ces réponses, je vous rappelle néanmoins que le cannibalisme est puni par la loi et que nous nous dégageons de toutes responsabilités s’il vous venait à l’idée de tenter l’une de ces recettes.
Besoin de films ou de livres pour rassasier vos envies cannibales ? N’hésitez pas à venir nous demander conseil !

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