Violation (2020) est un film d’horreur canadien réalisé par Madeleine Sims-Fewer et Dusty Mancinelli primé au Toronto International Film Festival ainsi qu’au Sundance Film Festival. La thématique puissante de ce long-métrage en fait une œuvre d’horreur qui mêle effondrement psychologique et vengeance. Madeleine Sims-Fewer au double-rôle de réalisatrice et d’actrice nous offre un rape & revenge fort en émotions qui retrace l’histoire de Miriam, une femme au bord du divorce, à la recherche d’une catharsis suite à son viol perpétré par son beau-frère, Dylan. Piégée dans une situation terrible qui l’empêche à la fois d’être soutenue par sa sœur et de déposer plainte à la police, Miriam décide de se rendre justice seule. Le parcours de cette héroïne au bord du gouffre se montre particulièrement éprouvant tout au long des scènes de vengeance mais aussi avec les nombreux flashbacks liés au traumatisme de Miriam qui nous sont envoyés comme une bombe à la figure.

La scène de viol dans les bois à l’atmosphère glaciale apparait bien plus insoutenable que le meurtre et le découpage du corps du violeur dans une chambre à l’allure de chalet tamisée par une lumière douce. La violence engendre la violence et la rancune de Miriam semble proportionnelle à ce qu’elle a subi. Sa souffrance ne se réduit pas seulement au viol, mais aussi à la trahison de son beau-frère envers elle et sa sœur. Tandis qu’elle essayera de le confronter, il n’assumera pas avoir agi sans le consentement de Miriam et se déculpabilisera en disant que la jeune femme lui avait laissé entendre qu’elle serait d’accord. Malgré le baiser échangé par Miriam et Dylan au cours de la soirée, le rapport sexuel n’est absolument pas consenti puisque Dylan profite du fait que sa belle-sœur soit endormie, saoule à ses côtés. Le réveil de Miriam durant l’acte sera particulièrement virulent. Tétanisée, alcoolisée, elle tentera tant bien que mal à se faire comprendre en baragouinant quelques mots. Une claque visuelle et psychologique qu’on se prend soudainement au visage. Une situation encore peu abordée à l’écran alors que les témoignages de femmes victimes d’agressions sexuelles ne font qu’augmenter ces dernières années. En cause, la libération de la parole des femmes (notamment liée au mouvement international #MeToo) mais aussi grâce à l’accession de certains postes clefs de l’industrie cinématographique à un nombre croissant de femmes. Avec des scènes de flashbacks amenées petit à petit lors de l’agonie de Dylan, la réalisatrice Madeleine Sims-Fewer rappelle le schéma classique que suive les survivantes d’agressions sexuelles : la déculpabilisation de l’agresseur et les remarques de l’entourage niant la version des faits de la victime voire la culpabilisant à cause de son comportement. Les reproches de sa sœur, Greta, qui refuse de croire en sa version des faits marquera l’obligation pour la jeune femme de réagir en conséquences. Sa confiance se retrouve alors brisée et Miriam s’engouffre dans une spirale de vengeance qui ne pourra prendre fin qu’à la disparition complète de son agresseur…

La torture de Dylan s’apparente à un procès, une justice dont elle n’aurait pas pu bénéficier dans le seul cadre légal. Cette réparation de l’injustice subie couplée aux moments forts du traumatisme de l’héroïne explose en des séquences de brutalité froide, calculée, presque jouissives et extrêmement cathartique. Elle le déshumanisera autant qu’il l’a fait en lui bandant les yeux, puis en pendant son cadavre au plafond afin de le saigner. Un bout de viande, voilà ce qu’il est, voilà comme Dylan a perçu Miriam pour s’octroyer le droit de disposer de son corps comme il le souhaitait. Entre la résignation et la justice, Miriam a choisi la deuxième solution à son problème. Il ne s’agit pas que d’elle mais aussi du bonheur de sa sœur, enfermée dans une relation toxique avec cet homme, son agresseur. Rappelons qu’en France, pour l’année 2018, 86% des Françaises se disaient victimes d’au moins une forme d’atteinte ou d’agression sexuelle dans la rue. Une nouvelle étude réalisée en 2021 dans une université de Lille démontre un chiffre tout aussi alarmant : sur un échantillon de 1 215 étudiant·e·s, 64% rapportent avoir été victimes d’au moins une forme de violence sexuelle depuis l’âge de 15 ans. Des chiffres qui ne correspondent pas à ceux du gouvernement et qui mettent en évidence la terrible faille qui existe dans la prise en charge et l’écoute des victimes, mais aussi à l’incapacité de la Justice Française a donné une définition claire du consentement. Néanmoins, les chiffres se rapprochent pour dire que dans 90% des cas la femme connait son agresseur et qu’il lui est proche. Les témoignages et les récits de vie n’étant pas des preuves à proprement parlé, une femme dans le cas de Miriam a-t-elle vraiment d’autres choix que de se faire justice ?
Violation est actuellement dispo sur la plateforme de screaming Shadowz !
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