Comptabilisant le premier baiser inter-ethnique à l’écran dans les années 60 avec la série originelle, le premier système fédéral anti-capitaliste, humaniste qui prohibe l’ingérence avec d’autres cultures, l’égalité des droits pour tout être vivant et une justice impartiale dès le début de la saga, la première relation transgenre à l’écran dans les années 80 avec Riker et Soren dans Next Generation, et mettant aussi en scène des relations polyamoureuses, bisexuelles, pansexuelles et non-genrées ainsi que la première intelligence artificielle à posséder des droits égaux à ceux de l’espèce humaine avec Data – l’un des premiers hommes noirs à un haut poste de pouvoir avec le Capitaine Sisko dans Deep Space Nine et la figure de la femme forte dans Voyager avec la Capitaine Janeway dans les années 90, jusqu’aux deux nouvelles séries Star Trek: Picard et Discovery qui mettent en scène toutes sortes d’individus divers et variés, unis par un but commun : celui de tendre vers un monde meilleur, la saga Star Trek dépeint un modèle de société utopique et progressiste. Au long des épisodes des différentes séries de cet univers de science-fiction, des dialogues d’une intelligence et d’une qualité rares trouvent alors leurs places dans un tourbillon d’événements galactiques parfois amusants, parfois dramatiques et toujours passionnants. Initiée par Gene Roddenberry, Star Trek est le récit d’un équipage d’un vaisseau spatial au sein d’un système politique universaliste et inclusif : la Fédération des Planètes Unies.

Un système universaliste et le déclin du capitalisme
Formée en 2161, la Fédération des Planètes Unies est une république fédérale galactique regroupant plus de 150 planètes membres et des milliers de colonies (en 2373), gérant un espace d’un rayon de 8 000 années-lumière au sein des Quadrants Alpha et Beta de notre Voie lactée. Cette institution est décrite par Gene Roddenberry comme une société socialiste, universaliste et inclusive. Sa capitale exécutive et judiciaire est basée à Paris, tandis que San Francisco est la capitale législative et militaire. Starfleet est une organisation affiliée à cette structure politique comprenant l’armée, la recherche scientifique et les missions diplomatiques. Une véritable volonté de la Fédération des Planètes Unies est de rendre l’exploration, et le secteur scientifique et militaire, uniquement dépendants d’une grande organisation publique. De ce fait, les membres de l’équipage de l’Entreprise apparaissent comme des fonctionnaires républicains. Starfleet Academy fonctionne selon les mêmes critères qu’une institution de concours de la Fonction Publique. Seven of Nine est-elle une vacataire de cette organisation galactique ? Illustrée par la devise : « Ex Astris Scientia » (« Des étoiles, la science »), la mission première de Starfleet est de récolter des informations, faire de la recherche, sur l’Univers et sur les vies qu’il abrite. Elle ne devient le bras armé de la Fédération que lorsque la voie diplomatique a échoué. Difficile en réalité de séparer ces deux organisations en structures distinctes lorsqu’on sait que le Président de la Fédération, voté au suffrage universel, détient le pouvoir exécutif. Le pouvoir législatif est quant à lui détenu par le Conseil de la Fédération, constitué d’élu·e·s de plusieurs membres d’espèces appartenant à la Fédération. Ce dernier a pour but de faire voter et ratifier les lois fédérales. Un questionnement demeure néanmoins : comment sont élu·e·s ses membres ? Selon leur propre système de suffrage et doivent-iles tou·te·s dépendre du suffrage universel ? De plus, les lois de la Fédération viennent-elles remplacer les lois en vigueur dans ces mondes ou vont-elles se hiérarchiser en dessous ou au-dessus des lois originelles de ces différentes cultures ? Les planètes membres de la Fédération ont pour obligation relative de posséder un système démocratique et non-autoritaire, mais qu’en est-il des particularités culturelles ?
Toute l’exploration spatiale, de la création de ses vaisseaux, la formation de ses employé·e·s au déploiement de la recherche se veut entièrement financée par la Fédération. Une question reste en suspens : qu’est-il advenu des entreprises privées ? Vivement critiqué par Gene Roddenberry, le secteur privé semble être l’apanage de la culture marchande des Ferengis et leurs Règles de l’Acquisition, véritable bible du capitalisme libéral, qui contient notamment Profit d’abord, amitié après (Never place friendship above profit, vingt-et-unième devise) ou Traite tes débiteurs comme tes parents… exploite-les (Treat people in your debt like family… exploit them, cent-onzième devise). Cette altérité, comme la plupart des races extraterrestres présentes dans la Science-fiction, représente bien des défauts exacerbés d’une humanité actuelle ou passée. Les Ferengis dépeignent une société dans laquelle le capitalisme a été érigé en une véritable idéologie religieuse. La Fédération des Planètes Unies apparait comme une économie socialiste avec une planification détaillée et centralisée (construction de vaisseaux, de bâtiments, de logements, distribution de synthétiseurs, recherche universitaire et scientifique, développement de la culture et de l’art) et des besoins humains primaires pleinement comblés (nourriture, eau, habits, outils de première nécessité) en opposition au capitalisme Ferengi et son marché libre et inégalitaire.
Auto-détermination et privilèges

Du piston ? Des privilèges au sein de cet univers socialiste ? Il y en a quand même. Wesley Crusher incarne ce favoritisme injuste. N’ayant même pas encore passé le concours de l’Académie, il se retrouve à réaliser un stage sur le meilleur vaisseau de Starfleet, l’Enterprise D, en compagnie de sa mère, médecin à bord. Petit génie, il découvre néanmoins une autre voie en explorant la mystérieuse spiritualité des Voyageurs. Sa carrière au sein de Starfleet était pourtant toute tracée, le choix d’un autre mode de vie de hippie spatial pour rejoindre Lakanta, qui reconnaît en lui un être d’exception pouvant même arrêter le temps, sera finalement encouragé par les membres de l’Entreprise. L’auto-détermination étant un principe fondamental de la Fédération, il met en avant les techniques de l’éducation positive. Il en sera de même avec Jake Sisko, refusant de rejoindre Starfleet pour devenir écrivain/journaliste. Rappelant les sciences de l’éducation à la Montessori, l’école républicaine de la Fédération des Planètes Unies est accessible à tou·te·s, toutes espèces comprises (si capacités cognitives adéquates). Basée sur l’apprentissage de la science (sciences de la nature et humaines), une grande partie du programme est adonnée à l’art et l’éthique. Une autre limite vient pointer le bout de son nez : des planètes éloignées de l’épicentre des institutions de la Fédération apparaissent comme pauvres tandis qu’on imagine facilement la vie terrienne riche et opulente. Ont-elles accès à ces infrastructures non par soucis d’argent mais par incapacité physique ? Toutes les colonies de la FPU disposent-elles de synthétiseurs et d’un Extranet de même qualité ? Y-a-t-il des écoles de la Fédération suivant le même programme que les écoles terriennes au sein des colonies les plus éloignées et les plus paysannes ? Et malgré ce système de mobilité sociale plutôt bien amené dans lequel le domaine culturel et artistique est perçu d’un bon œil, les personnages de Starfleet se présentent cependant comme relativement carriéristes. William Riker en fera notamment les frais en s’opposant à son père lorsqu’il refuse de quitter l’Enterprise pour un poste de capitaine de l’USS Aries (The Icarus Factor, épisode 14, saison 2 de Star Trek: Next Generation). La Fédération des Planètes Unies est bien un système social qui prend en compte l’éducation gratuite de ses membres, leur santé, leur besoin primaire (nourriture, logement, développement personnel que se soit dans le travail ou dans d’autres domaines) rendu viable grâce à la technologie centrale de la saga Star Trek : les synthétiseurs. Sans cet outil, il n’y aurait pas cette économie de l’abondance qui permit à cette utopie de se concrétiser. Il est effectivement plus simple de respecter toutes formes de vie lorsque nos sociétés ont stoppé la barbarie de l’élevage intensif, en remplaçant la nourriture de chair par des aliments de synthèse. Un débat d’ailleurs bien présent chez les éleveurs, notamment chez le frère du Capitaine Jean-Luc Picard, vigneron français du petit village de la Barre qui préfère la chasse et le bio à la nourriture synthétisée mais aussi chez la famille Troï-Riker, partie vivre à la campagne dans l’espoir de guérir leur enfant dans Star Trek: Picard (saison 1, épisode 6). La Fédération donne ainsi d’énormes moyens financiers et techniques ainsi qu’une grande autonomie d’actions à son service public, sans demander de résultats immédiats et de comptes à rendre. A-t-on entendu le Commander LaForge se plaindre de devoir trouver une réponse utile à ses hypothèses sous faute de quoi il perdrait d’éventuels financements ? Si Gene Roddenberry voyait son univers évoluer sans argent, il n’en est pas de même pour les scénaristes de Star Trek: Deep Space Nine. On le sent avec la surreprésentation du Latinium et des crédits de la Fédération circulants sur la station spatiale. Ces crédits sont-ils une base d’un revenu universel donné aux citoyen·ne·s de la Fédération avec des bonus liés au statut au sein de Starfleet ou autres services publics/travails ? Aucun indice disséminé dans les séries Star Trek ne permet de répondre à ces questionnements. Il est important de rappeler que la Fédération n’a pas été construite à son origine pour être une organisation socialiste et universaliste. Dans Star Trek: Enterprise, bien que la Terre du XXIIe siècle se trouve déjà dans une démarche socialisante, l’Alliance est en premier lieu une organisation militaire contre la menace romulienne. Même si ce n’est plus un problème d’argent, les infrastructures routières, les places dans les vaisseaux cargo sont-elles suffisantes pour ne pas créer d’inégalités ? Le voyage spatial est-il accessible ? Risa est une planète « vacances érotiques » sur laquelle de nombreux personnages des séries iront se reposer durant leurs permissions. En tant que planète de la Fédération, elle fonctionne néanmoins grâce à une économie touristique. Est-elle réservée aux membres de Starfleet ou est-elle accessible, par le coût et par la distance, à l’ensemble des habitant·e·s de la Fédération ? Et que faire de la noblesse de Betazed dans une société dite socialiste et du personnage de lwaxana Troï utilisant l’Enterprise comme navette entre ses déplacements selon son bon vouloir ? Aristocrate de naissance, elle dispose d’un majordome et de privilèges particuliers malgré l’intégration de sa planète au sein de la Fédération des Planètes Unies. Ce paradoxe est rattrapé par le fait que son majordome explique alors qu’il adore ce travail car il peut siroter de l’alcool de qualité lors des soirées mondaines et diplomatiques diverses et variées.
Le relativisme culturel contre la xénophobie : le respect de la différence et la non-ingérence

Chaque planète étant singulière, chaque être de la Fédération dispose en réalité de droits différents tant que l’ensemble des officiers de Starfleet répond aux Ordres Généraux. Ces derniers apparaissent comme « des directives générales » dans le sens où l’idée doit être présente du point de vue éthique mais leur application est à faire au cas par cas, veillant à prendre en compte la culture, l’individu, la civilisation, la menace ainsi que l’impact de Starfleet sur l’évolution naturelle des sociétés afin d’éviter toute « contamination culturelle » avant qu’un peuple n’ait découvert le voyage spatial en distorsion.
Le concept même de fédéralisme : chaque culture, planète ou même région dispose de sa marge de liberté. Et ce fait est appuyé par la célèbre Directive Première : la non-ingérence de la Fédération dans des conflits, des catastrophes naturelles, des épidémies, les politiques des planètes hors de son territoire mais aussi à celles inclues dans son espace tant qu’elles respectent la liberté de l’individu et qu’elles ne sont pas gouvernées par un régime fachiste et dictatorial. Il s’agit aussi de préserver tout écosystème, tout environnement où la vie serait capable de se développer sans un éventuel l’impact de la Fédération. On voit ici tout le paradoxe d’une Fédération socialiste puisque le socialisme se veut universaliste tandis que le fédéralisme se base sur les compromis et implique qu’il n’y ait pas une égalité parfaite en droits, ceci étant dû au particularisme judiciaire et législatif des états/planètes/civilisations membres. Habituellement contournée par « le droit d’asile », la Directive Première est régulièrement transformée en une non-assistance à personne en danger par les membres de Starfleet cherchant à se soustraire à cette interdiction (sur demande express de la part d’un individu, vivant dans une société connaissant déjà la distorsion). L’ensemble du corps médical de la Fédération ou de Starfleet semble systématiquement en désaccord avec leur Capitaine au sujet de la Directive Première : celle-ci entre souvent en conflit avec le serment d’Hippocrate et permet ainsi de longs débats riches et intenses détaillés dans un bon nombre d’épisodes de la saga. Elle est d’ailleurs utilisée comme ressort scénaristique lorsqu’elle est testée par des dilemmes éthiques et se retrouve souvent transgressée. En opposition totale avec cette liberté au sein de la FPU, l’empire cardassien ou klingon sont perçus comme des régimes autoritaires, basées sur l’honneur, la famille, la lignée et les traditions. Des systèmes politiques souvent dictatoriaux et fascistes se révélant très conservateurs, nationalistes et essentialistes. On le voit avec la quête absolu de Worf de devenir « un vrai klingon », une obsession plus puissante encore qu’il a été élevé par des humain·e·s au sein de la FPU et qu’il tentera d’imposer à son fils, Alexander. Ce dernier le détestera d’ailleurs de son éducation stricte et traditionnaliste. Les camps de travaux forcés cardassiens remplis de bajoran·e·s spoilié·e·s de leurs terres par des accords entre la Fédération et l’Empire. Le traité de paix entre la FPU et l’Empire Cardassien a d’ailleurs fomenté une révolution au sein même de la FPU : le Maquis. Alliance de Bajoran·e·s et autres espèces ayant trouvé injuste la répartition des planètes à la frontière FPU/Empire Cardassien, les maquisard·e·s n’acceptent pas les décisions de Starfleet qu’iels jugent injustes.

Du soi-disant communautarisme venant menacer une République ? Il n’en est rien dans Star Trek. Au contraire, la diversité des cultures et des mondes font la richesse de la Fédération des Planètes Unies ainsi que sa fierté. Le projet politique de la Fédération est donc à visée 1000% progressiste et inclusive mais il s’agit forcément d’une forme de socialisme adaptée à une multitude d’espèces différentes, de cultures particulières, répondant à des besoins et des normes différentes les unes des autres et, qui plus est, s’étendant sur un territoire bien trop grand pour qu’une centralisation totalement efficace puisse exister. C’est là où Star Trek prend toute sa dimension utopique. Une utopie n’étant pas un état fini, elle représente un idéal pour lequel on doit travailler mais qui n’est jamais atteint. Sans cesse, les efforts doivent être constants pour améliorer ce rêve qui ne sera jamais acquis. La Fédération des Planètes Unies apparait, de fait, bien que plus progressiste que la République Galactique de l’univers de Star Wars. Pour qu’un système politique de cette taille et de cette importance ne s’effondre pas sur lui-même, il est nécessaire qu’une éthique solide régisse les directives de la Fédération. C’est pourquoi il est nécessaire que ce soit la curiosité, l’imagination, la compassion et l’envie de découverte qui deviennent les principes intrinsèques de Starfleet. Dans Star Trek: Deep Space Nine, les thématiques de Religion et de Science sont abordées à travers le personnage de Benjamin Sisko, à la fois Capitaine de la station orbitale de Starfleet et émissaire des prophètes de la religion bajorane, un intermédiaire de ces formes de vie considérées malgré elles comme des êtres divins. De nombreux conflits politiques mettant en scène la foi, le fanatisme, l’espoir, l’opposition entre Science et Religion font de cette série l’une des plus « philosophique » de l’univers Star Trek. Jusqu’où peut-on tolérer des idéologies religieuses ? Croire pousse-il au fanatisme et à la violence ? Doit-on respecter la Religion au point de ne pas apprendre la Science aux nouvelles générations ? L’éducation de la Fédération passe bien par l’apprentissage de la Science mais aussi par le développement de l’esprit critique contre les idéologies. Keiko O’Brien, devenue professeure de l’école sur Deep Space Nine, contestera les demandes du gouvernement bajoran lui sommant de ne pas parler du Vortex (habitat des « prophètes » pour la religion bajorane) d’un point de vue scientifique. Elle se battra contre l’obscurantisme en édictant qu’une école se devait de posséder des méthodes d’enseignements laïques (Star Trek: Deep Space Nine, saison 1, épisode 19, Entre les mains des prophètes). Bien que toutes formes de croyances, de communautés et de religions soient respectées entièrement par la Fédération des Planètes Unies, elles ne peuvent en aucun cas se soustraire aux impératifs de la rationalité, du savoir et de la connaissance comme le souhaitait fermement Gene Roddenberry :
I condemn false prophets, I condemn the effort to take away the power of rational decision, to drain people of their free will — and a hell of a lot of money in the bargain. Religions vary in their degree of idiocy, but I reject them all. For most people, religion is nothing more than a substitute for a malfunctioning brain.
Je condamne les faux prophètes, je condamne leur effort conscient pour enlever le pouvoir de décision à leurs croyants, et se substituer à la rationalité, ainsi que pour drainer les gens de leur libre arbitre – et par la même occasion, soutirer de sacrées sommes d’argent. Les religions varient toutes dans leur degré d’idiotie, mais je les rejette toutes. Pour la plupart des gens, la religion n’est rien de plus qu’un substitut à un cerveau défectueux.
Il en est de même pour les Tellarites. Espèce fondatrice de la Fédération des Planètes Unies, il est très mal vu d’omettre de faire des réflexions à autrui dans la culture tellarite. De leur point de vue, améliorer les choses sans cesse est le but de leur existence. Il est donc nécessaire de développer l’esprit critique et d’aller toujours plus loin dans les compromis. Une espèce de syndicalistes spatiaux, leur culture est plus que favorable à la pratique de la démocratie et ainsi basée sur la critique constructive et sur l’amélioration infinie du quotidien, loin du conservatisme prôné habituellement par les systèmes cléricaux.
« Tellarites do not argue for a reason, they simply argue.«
(Sarek, 2268, Journey to Babel)

Et la libération des mœurs ?
Star Trek est l’un des univers les plus progressistes lorsqu’on se penche sur les représentations de ses relations amoureuses et érotiques. Une mixité sociale, ethnique et raciale est présente tout au long de la saga et se cumule avec la pensée que l’amour n’a pas de frontières. L’important comme le dirait le Commander Riker étant avant tout le respect et le consentement. Les autres détails de « l’amour » doivent uniquement regarder les partenaires : triolisme, partouze, relations polyamoureuses, relations non-genrées, relations transgenres, coups d’un soir, accouplement mentale, paraphilies ou sexe rituel, Star Trek nous dépeint un panel de relations sexuelles et amoureuses originales, libres et intelligentes. De nombreux épisodes posent l’importance fondamentale d’un consentement édicté clairement avant toute intrusion dans l’intimité. L’épisode Viols de Star Trek: Next Generation (saison 5, épisode 12), Devoir de Mémoire de Star Trek: Voyager (saison 3, épisode 6) ou encore l’arc narratif du viol mental de T’Pol dans Star Trek: Enterprise dépeignent des intrusions télépathiques non consenties pouvant être vécues comme de véritables viols physiques, car c’est là le fondement même de la culture du viol : nier la nécessité absolu d’un accord mutuel défini, sans relation de pouvoir, ou de chantage en jeu.
Il nous reste finalement si peu de temps si l’on veut un jour pouvoir atteindre cette utopie à la Star Trek. La moitié de la Planète est déjà sur le point de devenir des réfugié·e·s climatiques, la montée du fascisme et du racisme en Europe, les traitements inhumains réservés aux exilé·e·s, la discrimination de la différence sous toutes ses formes, la condition de la femme partout dans le Monde, l’explosion des inégalités de richesses, les injustices dues à l’impunité des pouvoirs mis en place, l’oubli de la démocratie, autant de conditions néfastes pour l’arrivée d’un futur meilleur. L’espoir qu’une humanité nouvelle et bienveillante ait survécu à ces catastrophes qu’une minorité de la classe dirigeante, d’un système capitaliste injuste et dépassé, a formé en veillant à exploiter les un·e·s et à en criminaliser les autres, à détruire les sols pour produire et vendre davantage au plus bas prix pour obtenir le monopole absolu quitte à surexploiter les ressources de la planète, détruisant des produits parce que les remballer leur couterait plus cher que de les détruire, chamboulant ainsi l’équilibre de la nature. Un cercle vicieux sans aucun sens ni intérêt qui ne sert qu’une toute petite partie de l’humanité. Tout ça, dans l’unique but égoïste et vaniteux de garder ses privilèges quitte à détruire son propre foyer et à étouffer la plus grande majorité de leur propre espèce. Une oligarchie économique, au-dessus des lois puisque multinationales, d’un autre âge qui perdure néanmoins dans le temps, accepté par tou·te·s parce qu’elle représente une norme idiote qui n’a plus aucune raison d’être. Le pire cauchemar de Marx s’est bien réalisé, à quand donc un véritable système socialiste et universaliste ? Ni le silence ni la résignation amènera à un changement positif et nécessaire à une humanité plus intelligente et libre des carcans que cette classe dominante, d’industriel·le·s et de politiques.
Un futur possible…
En 2024, de la timeline de Star Trek, des émeutes d’envergure éclatent à San Francisco, puis un peu partout dans le monde. La France, pays de la liberté et des droits de l’Homme, voit des manifestations éclater dans le milieu étudiant. Les néo-trotskystes délogent les gaullistes du pouvoir. Impulsés par ce qui se passe à Paris, de profonds bouleversements politiques se déclenchent dans toute l’Europe et un membre de l’élite américaine fera remarquer avec dédain que « l’Europe s’effondre« . Si Gene Roddenberry était un artiste visionnaire, il était aussi révolutionnaire. Et comme dirait un Jean-Luc Picard athée et philosophe (Star Trek: Next Generation, saison 1, épisode 1, Rendez-vous à Farpoint : reconstitution des tribunaux post-atomiques terriens par l’entité Q) :
« Nous reconnaissons à notre grand regret que l’humanité a été, il y a longtemps, une espèce abjecte et malfaisante.«
Non sans rappeler l’engouement des manifestant·e·s Black Lives Matter ou les révoltes féministes dont la parole a été fortement libérée grâce au mouvement #MeToo et aux réseaux sociaux, ainsi que les insurrections visibles tout autour du globe contre les politiques néo-libérales, les manifestations de 2024 de l’univers de Star Trek se déclenchèrent en raison des injustices économiques et sociales perpétrées par un système vertical et conservateur gardé précieusement en place par quelques riches humain·e·s. Ces émeutes débouchèrent sur la troisième et dernière Guerre Mondiale de l’Histoire de l’Humanité (2026-2053) débutée sur la thématique du génome humain et des modifications génétiques. Génocide, écoterrorisme et l’utilisation d’armes nucléaires causèrent la mort de plus de 600 millions d’individus. Les grandes villes planétaires ayant été détruites, l’horreur post-atomique perdure jusqu’en 2079 avec ses tribunaux dans lesquelles tout le monde est coupable jusqu’à preuve de son innocence. Cette culture fasciste fit sombrer le monde dans un véritable chaos. Au début du XXIIe siècle, un mouvement néo-transcendantaliste, fondé par Liam Dieghan, préconisa un retour à une vie plus simple, plus respectueuse de son environnement et de la vie. Un autre mouvement, Terra Prime, suivit une politique xénophobe. Considérant la race humaine comme étant la seule espèce « pure », ce groupe instaura une méfiance générale envers les autres espèces de la galaxie, fraîchement découvertes, et chercha à empêcher la Fédération de voir le jour (Star Trek: Enterprise, saison 4, épisode 21, Terra Prime).
Ces horreurs débutées par les émeutes de Bell à San Francisco et commises par une humanité séparée entre riches et pauvres, vidée de ses ressources car trop gourmande pour se priver dans le présent et trop paresseuse pour s’imaginer vivre dans un meilleur futur, débouchèrent finalement vers le glissement d’une socialisation des sociétés humaines, le commencement de la politique inclusive de la Fédération des Planètes Unies. Tout en ayant conscience que « faire la révolution » ou même « manifester » est toujours difficile, car il faut avoir les moyens de se loger, de se chauffer, de s’alimenter et de nourrir leurs proches tout en faisant grève, ou/et ne pas avoir peur de risquer sa vie, un membre de son corps, ou encore son équilibre psychologique en participant à une révolte. De nombreux pays tolèrent l’utilisation d’armes à feu pour contrôler des manifestant·e·s, on voit là la violence dite légitime de ce petit groupe, qui en prétextant la paix sociale écrase quiconque met en péril sa légitimité et son contrôle. La répression actuelle au sein de la République Française ainsi que les violences policières éparpillées un peu partout dans le monde viennent appuyer la peur de plus en plus grande de cette minorité dirigeante qui s’auto-légitime par leurs possessions économiques. Mais quand ce pouvoir sert de mauvaises causes ? Quand les gouvernements laissent mourir la planète et l’humanité ? Quand les états ne protègent plus leurs citoyen·ne·s ? Quand les pays laissent mourir des réfugié·e·s, des personnes âgé·e·s, des malades, sous prétexte qu’il est davantage nécessaire d’utiliser de l’argent pour relancer l’économie plutôt que investir dans les systèmes de santé, dans les structures d’accueil, dans les organismes publics ? Quand le « droit des affaires » protègent les entreprises privées et les écrasantes multinationales et les exemptent de visibilité, de rendre des comptes aux habitant·e·s qu’elles dépossèdent de leurs terres empoisonnées par leur fait, aux employé·e·s qu’elles exploitent, à une consommation de masse qu’elles trompent, aux lanceurs d’alerte qu’elles méprisent ? Quand les gouvernements ne respectent pas leurs propres principes républicains d’égalité, de liberté et de fraternité ? Quand l’humanité vit dans un système qui ne lui convient plus, qui ne répond plus à ses besoins et qui réduit ses chances de survie ? Lorsque l’on se rend compte que tout cela n’est qu’un beau mensonge, réactualisé par des techniques de communication de plus en plus élaborées, utilisant à tort et à travers nos biais cognitifs pour nous faire participer à ce petit jeu d’une fausse république, d’un marché de « confort » poussé à l’extrême, est-il encore « éthique » de ne pas réagir ?
Benjamin Sisko dira qu’obéir aveuglement aux ordres et aux normes d’une institution sans esprit critique, même si celle-ci possède de beaux principes est contraire à l’éthique (Star Trek : Deep Space Nine, saison 2, épisode 21, Le Maquis : Partie 2).
– Elle [L’Amiral Nechayev] croit peut-être que le fait d’appartenir à la Fédération fait systématiquement d’eux des Saints ?! Vous savez quel est le problème ?
– Non. (Kira)
– Le problème, c’est la Terre.
– La Terre ?
– Sur Terre, il n’y a ni pauvreté ni crime ni conflit. Quand on regarde par les vitres du quartier général de Starfleet, on voit le paradis alors évidemment : ce n’est pas difficile d’être un saint au paradis mais les membres du maquis ne vivent pas au paradis eux. Là où ils vivent, dans la zone démilitarisée, tous les problèmes n’ont pas été résolus. Là où ils vivent, il n’y a pas de Saints. Non, juste des hommes en proie à la peur, à la colère. Des hommes déterminés à aller jusqu’au bout, à tout faire pour survivre que la Fédération leur donne ou pas sa bénédiction.
– Je ne trouve rien à redire.
Pour lui, c’est la responsabilité de chacun.e que de réfléchir correctement avant d’exécuter un ordre (une norme, une façon d’agir, et consommer, etc.), de voir et de constater de ses propres yeux l’étendue de la misère. Il est facile de se dire du côté du « bien » lorsque sa condition ressemble au « paradis » et d’expliciter avec une hypocrisie sans nom que les problèmes viennent de ceux et celles qui pointent le doigt dessus. Et bien qu’aucun changement ne se fait jamais sans douleur, sans perte de repères et sans hésitation, il arrive des fois où celui-ci devient nécessaire, presque vital, pour un plus grand bien-être commun.
Dans l’infime espoir qu’au XXIVe siècle, des enfants de toutes origines naîtront sereinement au sein d’une Fédération des Planètes Unies à l’abri de la faim, du froid, des maladies, des idéologies meurtrières ou réductrices, des valeurs conservatrices, sexistes et racistes, des guerres et des génocides, des mauvais traitements et des viols. Qu’iels aient le droit à l’éducation, à la culture, à l’Histoire, à l’Art, au développement de leur esprit critique pour que jamais les erreurs de leurs ancêtres ne puissent se répéter. Qu’iels grandissent loin de clichés de genre, des stéréotypes sur les personnes racisées et ceux sur les classes sociales. libres d’un système capitaliste, d’une hiérarchisation verticale, et d’un libéralisme cruel inventés par une infime minorité avide et véreuse, destructrice de mondes, pour laquelle tout s’achète, tout se paie, tout se vend, même une vie. Qu’iels possèdent une profonde conscience écologique et éthique sur ce qui caractérise réellement un être vivant et le respect immuable qui doit aller de paire avec le principe de cet état (un être conscient et sentient comme toutes les espèces présentes sur notre planète). Car, c’est encore loin d’être le cas en 2020… Mais comme Gene Roddenberry le dirait :
Star Trek speaks to some basic human needs: that there is a tomorrow — it’s not all going to be over with a big flash and a bomb; that the human race is improving; that we have things to be proud of as humans.
Star Trek parle de certains besoins humains fondamentaux : qu’il y ait un lendemain – que tout ne s’arrêtera pas avec un gros flash et une bombe, que la race humaine s’améliorera, que nous avons de quoi être fiers en tant qu’humains.

Quelques précisions concernant l’économie de la FPU:
L’URSS avait une économie socialiste mais conservait un secteur capitaliste restreint (kolkhozes). La plupart des Etats ont des une économie capitaliste mais aussi des systèmes d’échange locaux (SEL), des jardins d’échange universel (JEU) et des communautés intentionnelles postcapitalistes tel que certaines Decentalized Autonomous Organisation (DAO). Les membres de l’ONU n’ont pas tous le même système économique et les agences spatiales interétatiques peuvent compter des membres avec des systèmes économiques divers. Le système économique de référence de la FPU est une économie d’abondance inspirée de celle de l’Union terrienne et elle la met en place chez les Membres et les colonies qui en font la demande; tous ne le veulent pas et certaines espèces ne le peuvent pas.
L’économie d’abondance de la FPU n’est pas fondée sur une démonétisation totale mais sur le remplacement de la monnaie de thésaurisation (le latinium plaqué or chez les Férengies) par une monnaie de consommation. Comme les unités d’échange des SEL, le crédit fédéral ne représente aucune richesse: il est la concrétisation d’un droit à consommer. Chaque citoyen de la FPU a droit compte dans l’administration centrale de sa communauté: un pour ses achats vivrier, un pour ses dépenses professionnelles et un pour ses loisirs. Les comptes sont périodiquement alimentés en crédits par la Fédération, la monnaie inemployée étant supprimée à chaque échéance. Les équipages des vaisseaux et stations de Starfleet fonctionnent sur un principe voisin: le chef des opérations ou le commandant de bord alloue les ressources du vaisseaux aux différents services (compte professionnel), impose un rationnement de la consommation en cas de crise (compte de vivrier) et distribue des crédits aux hommes en permission (compte de loisir).
L’économie d’abondance de la FPU est donc fondée sur un certain évergétisme par création monétaire (allocation de crédit) et une régulation publique musclée (limitation de l’automatisation, économie circulaire, gestion des ressources naturelles). La FPU assure gratuitement le transport interplanétaire des citoyens sous réserve des restrictions imposées par la législation des Membres sur l’immigration; la FPU n’est pas les USA. En revanche, il n’y a pas aucun signe de collectivisation des biens et des services ou de planification économique qui ne sont aucunement indispensable à la production de vaisseaux ou stations spatiales. Du point de vue de l’initiative entrepreneuriale et des échanges, l’économie d’abondance s’apparenterait plutôt au Jardin d’Echange Universel de Daniel Fargeas ou à l’écosociétalisme d’André-Jacques Holbecq. Ce qui explique l’existence de marchands vulcains ou d’escroc comme Hartcourt Mudd…
Quand on positionne les mondes majeurs de la Fédération sur une carte, on constate que les Membres éloignées de la capitale ne sont pas moins prospères que les autres. Il faut plutôt parler d’une certaine frugalité des Colonies à l’époque de Kirk: les limites de la technologies et de leur développement les rendent provisoirement tributaire du soutien logistique de Starfleet. Les Colonies sont fondées par des volontaires qui acceptent ses rigueurs en échange du droit de construire une société conforme à leur attente avec l’appui du Bureau de la Colonisation et de Starfleet. Certaines sont terrifiantes et une poignée ont sombré dans le chaos (Turkana IV, Nimbus III)
Concernant le volet politique, la FPU est une union d’Etat à mi chemin entre les USA de Roosevelt et de l’ONU qui reste très éloignée des républiques populaires les plus décentralisées (Yougoslavie, Hongrie):
-La Fédération a des objectifs civils fédérateurs bien définis et la défense commune n’est pas son but mais un moyen pour préserver son projet de société; elle n’a pas besoin d’ennemis pour justifier son existence.
-La Fédération ne cherche pas à s’élargir à tout prix: seul les mondes aptes à participer à son projet de société sont incorporés. Elle applique la non-ingérence à l’excès (indifférence aux populations étrangères low tech victimes de cataclysme).
-La Fédération dispose de moyens d’action étendu mais les Membres conservent l’essentiel du pouvoir normatif, notamment en matière d’immigration, de douane et de commerce.
-La Fédération n’a pas seulement des compétences mais aussi le devoir (constitutionnel) de secourir les membres et ses administrés: il n’y a ni profusion de normes fédérales, ni passivité face aux malheurs des Membres et des Colonies.
-Les lois fédérales sont votées aux deux tiers ce qui, combiné aux limites du pouvoir normatif fédéral, génère un fédéralisme
-Le Conseil de la Fédération est composé d’une délégation de 1 à 5 conseillers par Membre dont un ambassadeur. Chaque Membre nomme et révoque ses conseillers à sa convenance. Chaque délégation a une voix. La très grande majorité des conseillers n’ont pas d’échéance électorale, d’impératif financier, d’obligation de se mettre au service de lobbies pour organiser leur fin de carrières. Ce ne sont pas des particrates cyniques mais ils tournent volontiers la tête quand leurs agents de terrain règlent les problèmes (section 31, opération anti-maquis) et ils ne reculent devant aucune concession pour conclure la paix.
-Le chef d’Etat et de gouvernement est le Président de la Fédération, élu par le conseil parmi les ambassadeurs pour un mandat six ans non immédiatement renouvelable. Nul ne peut être réélu tant qu’il reste des ambassadeurs n’ayant pas exercé le mandat présidentiel parmi ceux siégeant au Conseil. Le Conseil, indissoluble, peut le destituer avant le terme de son mandat par une motion adoptée aux deux tiers. Le Président n’est pas impuissant mais le Conseil n’est pas un chambre d’enregistrement.
-Le pouvoir judiciaire est composé de juges nommés pour dix ans et de juges suprêmes nommés ou reconduits chaque années. Il n’y a pas de risques de dérives krytocratiques comme celles commises par la Cour suprême américaine à une certaine époque.
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Merci beaucoup pour toutes ces précisions !
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