Très dynamique, le cinéma sud-coréen ne cesse d’intéresser les spectateurs du monde entier. Même si la majorité des productions cinématographiques sud-coréennes visent en majorité un jeune public (l’expansion des drama coréens humoristiques ou à l’eau de rose) et de natifs (productions de films classiques basés sur les traditions et la culture coréenne), une nouvelle vague de réalisateurs modernes a permis au cinéma sud-coréen de prendre son envol dans les années 2000. De nouveaux films coréens qui intéressent les autres pays et qui obtiennent une place de plus en plus importante dans les festivals internationaux. Des films coréens forts, émouvants et humains qui prennent une importance considérable dans la culture populaire mondiale.
Old Boy (Park Chan-wook, 2003)
Oh Dae-Su s’apprête à fêter l’anniversaire de sa petite fille lorsqu’il est arrêté par la police pour ivresse sur la voie publique. Son ami, Joo-Hwan arrive au poste et persuade les policiers de le faire sortir. Sur le chemin du retour, Oh Dae-Su est kidnappé et ensuite séquestré dans une pièce durant quinze ans. Il ignore tout de la raison de sa présence ici et n’a pour seul lien avec l’extérieur qu’une télévision par laquelle il apprend le meurtre de sa femme et qu’il en est le principal suspect. Sa fille, quant à elle, a été confiée à des parents adoptifs. Au bout de ces quinze années d’enfermement et de tortures psychologiques, Oh Dae-Su est finalement relâché, toujours sans explications. Arrivant ensuite dans un restaurant afin d’y dévorer un poulpe vivant, il reçoit un téléphone par lequel le responsable de son enlèvement va le contacter… Oh Dae-Su n’aura alors qu’un seul but : trouver la raison et le commanditaire de ce rapt. Pourquoi sa vie a-t-elle été détruite de cette façon ?
Basé sur un manga de 8 volumes de Nobuaki Minegishi et Garon Tsuchiya sorti en 1997 au Japon, le film Old Boy reçu un très bon accueil à l’international ainsi qu’un très grand nombre de récompenses telles que le Grand Prix du jury lors du Festival de Cannes en 2004, Prix du meilleur film asiatique lors des Hong Kong Awards en 2005 ou encore le Grand Prix de l’Union de la critique de cinéma en 2005. Magnifique hymne sur le thème de la vengeance, Old Boy sait plaire autant qu’il dérange : des scènes oppressantes, une ambiance glauque, le ressenti d’une haine et d’une colère toujours plus puissantes, le tout accompagné par une irrésistible envie de comprendre la raison de l’enfermement de Oh Dae-Su, un humour décalé ainsi qu’une bande-originale exceptionnelle de Jo Yeong-Wook. Ce film fait partie d’une trilogie de films coréens axée sur le thème de la vengeance.

A Puppet (Kwon Yeong-Rak, 2013)
Ji Hun est psychiatre renommé dont la spécialité est l’hypnose. Un jour, il rencontre la fiancée de son meilleur ami Jun Gi à son bureau. Cette jeune femme nommée Hyeon Jin souffre d’hallucinations et souhaite connaître les origines de son mal-être en consultant Ji Hun. Ce dernier décide alors d’utiliser l’hypnose sur Hyeon Jin dans l’espoir d’en apprendre davantage sur son passé et sur les raisons de ses hallucinations. La jeune femme commence à aller mieux au fur et à mesure des séances tandis que Ji Hun tombe petit à petit sous le charme de la fiancée de son meilleur ami. A-t-il le droit d’utiliser son pouvoir d’hypnose pour aller plus loin ?
Réalisé par Kwon Yeong Rak, ce film entre dans la catégorie des drames horrifiques, ce qui pourtant ne se ressent pas particulièrement. En réalité, Ji Hun est un homme froid qui ne croit pas en l’amour et qui se sent très seul. Son attirance pour la jeune Hyeon Jin apparaît rapidement comme tordue et perverse. Le film n’est pas effrayant, pas de jump scare ni de scènes gores, néanmoins certaines scènes peuvent paraître choquantes, dérangeantes et lourdes psychologiquement. Tout au long du film, on découvre surtout le malaise grandissant qui va se former entre Hyeon Jin, Ji Hun et son meilleur ami Jun Gi.

Deux sœurs (Kim Jee-Woon, 2003)
Su-Mi et Su-Yeon sont deux sœurs très proches l’une de l’autre. Elles rentrent chez elles après une longue absence et sont accueillies par leur belle-mère, une femme critique à l’allure de mégère. Su-Mi l’évite et prend la main de sa sœur, Su-Yeon qui semble en avoir peur. Des événements étranges vont se produire dans la maison, des visions d’horreur tandis que la relation entre la belle-mère et les deux jeunes filles s’aggrave de jour en jour. L’intrigue se met alors en place : De quoi les filles ont-elles si peur ? Que s’est-il réellement passé dans cette demeure ?
Ce film est l’adaptation d’un conte populaire coréen, Rose et Fleur Lotus. Réalisé par Kim Jee-Won, Deux sœurs dispose d’un merveilleux scénario qui fascine le spectateur dès la première scène. L’histoire est tournée du point de vue de Su-Mi, l’aînée, qui souffre de graves troubles psychiatriques. Des informations quant à son passé sont distribuées tout au long du film sous forme de souvenirs, rêves ou hallucinations terrifiantes. Des émotions florissantes et torturées, une solidarité sans faille des deux sœurs, le tout accompagné d’un musique hypnotisante composée par Lee Byeong-Woo valut à ce film plusieurs récompenses à l’international telles que le Prix du meilleur film au Festival international du film de Catalogne en 2003 ou encore le Grand Prix de la jeunesse au Festival du film fantastique de Gérardmer en 2004. Un film à la fois poétique, doux et effrayant qui vaut la peine qu’on s’y attarde.

A Man Who Was Superman (Yoon-Chul Jeong, 2008)
Soo Jung, une productrice de télévision ambitieuse cherche un nouveau sujet pour relancer sa carrière et s’imposer dans son métier. Le scoop qu’elle attendait arrive lorsqu’elle fait la connaissance d’un homme étrange qui prétend être Superman. Ce dernier est venu sur Terre pour aider les humains mais s’est malheureusement retrouvé dépourvu de ses pouvoirs.
Derrière cette histoire un peu déjantée se cache en réalité un récit très émouvant. Ce film est truffé de situations hilarantes : notre Superman arrête un exhibitionniste devant une école ou cherche à stopper la pollution urbaine. Plus le film avance, plus on voit Soo Jung s’attacher à son sujet télévisé, elle en apprendra davantage sur le passé de cet homme étrange qui se révèle être quelqu’un de torturé. Une histoire aussi émouvante qu’originale qui nous rappelle que la gentillesse, l’honnêteté et la sincérité cachent souvent des expériences passées douloureuses. Comme tout bon drame sud-coréen, ce film nous fait réfléchir sur l’humanité de ses personnages et sur les rapports entre êtres humains.

Postman To Heaven (Lee Hyung-Min, 2009)
Jo Hana, une jeune femme pleine d’entrain, a entendu parler d’une rumeur très particulière : il existerait une boîte aux lettres rouge dans laquelle on peut déposer les courriers que l’on destine aux morts. Elle entreprend alors d’envoyer un message à son petit ami décédé et tombe nez à nez avec Shin Jae-Joon, le postier sexy, qui lui explique qu’il livre bien ses lettres à destination. Cherchant de l’aide pour accomplir son travail, ce dernier demande à l’incrédule Jo Hana de devenir son assistante. Mais qui est réellement ce Shin Jae-Joon ?
Postman To Heaven est un film aussi dramatique que romantique. Non seulement l’histoire se concentre sur les sentiments de Jo Hana, sur le deuil qui lui reste à faire et ses sentiments naissants à l’égard de Shin Jae-Joon, mais également sur les deuils d’autres protagonistes que nos deux personnages vont chercher à faciliter puisqu’il s’agit là de leur mission principale. Jo Hana va devoir faire face à des problématiques éthiques : ont-ils le droit de mentir à une personne en deuil pour rendre cette épreuve moins difficile ? Comment répondre aux questions restantes après la mort d’un proche ? Émouvant et drôle, ce film est aussi un peu lent. Certaines scènes tirent en longueur, et peuvent facilement ennuyer le spectateur. Néanmoins le caractère gai et spontané de la jeune Jo Hana va donner une apparence légère et humoristique à ce film jusqu’à en oublier la trame principale et se plonger dans un univers agréable et romantique.

Maundy Thursday (Song Hae Seong, 2006)
Yu-Jung, une jeune femme froide et suicidaire, est dans l’incapacité de trouver une once de bonheur dans ce monde. Elle appelle alors sa tante, une nonne nommée Sœur Monica qui lui parle de Yun-Soo, un détenu condamné à mort dont elle s’occupe. Sœur Monica sollicite Yu-Jung pour donner quelques conseils à ce prisonnier dans l’espoir qu’elle se rende compte de sa chance d’être vivante et en liberté. Petit à petit, la relation entre les deux personnages évolue et Yu-Jung commence à apprécier la présence de Yun-Soo. Ils vont apprendre à se connaître davantage et l’un comme l’autre vont commencer à parler des événements qui les ont poussés à se retrouver dans cet état.
Un véritable drame coréen ! L’un de ces films coréens qui se veut sérieux et déprimant. Une ambiance maussade dûe au fait que le film se déroule quasiment qu’en huit clos, entre les murs de la salle de visite de la prison. Cependant, la relation naissante entre les deux protagonistes devient rapidement intrigante et le spectateur est pris d’une irrésistible envie de connaître le passé de ces personnages afin d’espérer comprendre la situation et les réactions parfois étranges de Yu-Jung et Yun-Soo.

Spring Breeze (Jang Hang-Jun, 2003)
Seon-Guk, écrivain dont le père vient de décéder, voit débarquer dans sa vie une jeune serveuse de café, Hwa-Jung. Elle s’installe dans une chambre de sa maison suite à une dette d’argent contractée par le défunt père de son propriétaire. Méprisant son propre père et les individus comme Hwa-Jung, Seon-Guk décide de rembourser au plus vite cette dette dans l’espoir de voir disparaître la jeune serveuse. Il souffre également d’une panne d’inspiration pour son prochain livre et va petit à petit s’inspirer de Hwa-Jung.
Un film hilarant et plein de bons sentiments ! L’histoire se concentre sur les différences fondamentales entre les deux protagonistes : l’une n’est pas riche, pas connue mais heureuse et toujours de bonne humeur tandis que l’autre, écrivain célèbre, semble stressé, dépité de la vie et râleur. Leur rencontre va remettre en question la vie de Seon-Guk qui va chercher à comprendre la vision du monde de Hwa-Jung. Des situations tout bonnement déjantées, des blagues à gogo et une histoire d’amour naissante qui font de ce film un véritable divertissement agréable à regarder.

Sorum (Yoon Jong-Chan, 2001)
Yong-Hyun, un jeune chauffeur de taxi, emménage dans un vieil immeuble délabré, appartement 504. Il fait petit à petit connaissance avec ses nouveaux voisins (dont un écrivain travaillant sur les faits divers survenus dans cet immeuble) et découvre que le dernier occupant de son appartement est décédé dans un incendie. Un peu bouleversé par cette nouvelle, il fait la connaissance de Sun-Yong, une voisine battue par son mari. Au fur et à mesure qu’il se rapproche de Sun-Young et décide de l’aider, des événements étranges surviennent dans l’immeuble.
Embrassé par la critique locale sud-coréenne, Sorum est un film d’horreur plus dérangeant qu’effrayant. Cette œuvre est davantage un drame amoureux qui met en scène des personnages torturés, un cadre de vie et une pauvreté difficiles à supporter ainsi que le besoin humain d’être compris.e et aimé.e. Très lent et éprouvant, ce film ne laisse pas de marbre puisqu’il invite le spectateur à contempler la misère matérielle et la complexité humaine.

Castaway on the Moon (Lee Hey-Jun, 2009)
Seong-Geun, un employé surendetté, tente de se suicider en sautant d’un pont au-dessus du fleuve Han en plein cœur de Séoul. Lorsqu’il reprend connaissance, il se trouve sur une île déserte située dans le fleuve de Han. Il essaye alors d’appeler avec son téléphone qui a prit l’eau, puis de rentrer à la nage sans succès : il n’a aucun moyen de retourner à la civilisation qu’il aperçoit pourtant très bien depuis son île. De l’autre coté de la rivière, Yung-Yeon, une jeune femme vivant chez ses parents et n’étant pas sortie de sa chambre depuis des années, vit une vie solitaire et virtuelle via son blog dans lequel elle s’est créée une autre identité. Deux fois par an, lors des entraînements des citoyens à une attaque aérienne, Yung-Yeon ouvre ses volets et prend des photos de la ville déserte. En cette occasion, elle aperçoit Seong-Geun échoué sur son île. Jour après jour, elle observe et prend en photo les faits et gestes de Seong-Geun. Ce dernier apprend à vivre en autonomie, à cultiver, à chasser et reprend petit à petit goût à l’existence : son but étant de réussir à faire des nouilles aux haricots noirs de lui-même en cultivant du maïs. Il devient une véritable source d’inspiration pour Yung-Yeon qui ne sait pas réellement s’il s’agit ou non d’un être humain. Les deux protagonistes vont se mettre à communiquer : Seong-Geun en traçant des lettres dans le sable et Yung-Yeon en envoyant des lettres imprimées dans des bouteilles depuis le pont…
Diffusé pour la première fois en France sur ARTE, le 26 février 2015 sous le titre Des nouilles aux haricots noirs, Castaway on the Moon est sans doute le meilleur des films coréens de cette sélection. Un scénario brillant et original, des acteurs doués et expressifs, des psychologies tordues, des relations sociales particulières. Les deux personnages ont besoin l’un de l’autre pour guérir et congédier leurs problèmes : Yung-Yeon se met à sortir de chez elle pour envoyer des messages à Seong-Geun, et Seong-Geun réapprend à communiquer pour la première fois avec Yung-Yeon depuis son arrivée sur l’île. Ce film nous fait réfléchir sur la société moderne et son lot de maux actuels : repli sur soi-même (phénomène connu sous le nom de hikikomori au Japon), surendettement, difficultés des rapports sociaux, vie virtuelle. Tout ça avec beaucoup d’humour, de légèreté, un peu de romance et plein de bons sentiments.

Printemps, été, automne, hiver… et printemps (Kim Ki-Duk, 2003)
Printemps, été, automne, hiver… et printemps est comme son nom l’indique un film qui se déroule en cinq parties. Un vieux maître zen et son disciple, un jeune enfant, vivent dans une pagode en bois flottant au milieu d’un lac avec comme seul moyen de liaison avec l’extérieur une petite barque. L’histoire se déroule alors selon les étapes de la croissance de l’enfant jusqu’à sa maturité, du statut de disciple à celui de maître. L’enfant doit alors apprendre à maîtriser ses pulsions et à écouter les conseils avisés de son maître. Des événements et personnages extérieurs apparaissent petit à petit dans la vie du disciple et rendent sa formation de moine de plus en plus difficile à réaliser.
Film contemplatif par excellence, cette œuvre peut paraître très lente. Elle est néanmoins bien réalisée, les décors et les paysages sont magnifiques, la relation entre le maître et son disciple est décrite à la perfection, les sentiments des personnages transparaissent facilement malgré un gros manque de paroles. Le film joue sur les silences des personnages mais aussi de la musique pour appuyer le caractère de la pagode, du climat, des paysages. Les bruissements dans les arbres, le clapotis de l’eau, les bruits des animaux nous transporte dans un monde rural et réellement zen. Ce qui vient entacher ce sentiment de paix et de beauté sont le rapport de dominations entre l’Homme et l’Animal et les sentiments humains tels que l’envie, la colère, la passion. Ce film a obtenu un grand succès à l’international ainsi que plusieurs récompenses telles que le Prix du meilleur film lors des Blue Dragon Film Awards en 2003, le Prix NETPAC au Festival international du film de Locarno en 2003 ou encore le Prix Arte et CICAE au Festival international du film de Locarno en 2003. Bien qu’il soit à regarder avec une grande patience, ce film reste un chef d’œuvre du cinéma sud-coréen et trouve aisément sa place au sein de cette petite sélection de films coréens !

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